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Université de la Terre 2015: best of des interventions orales

NiceFuture vous propose en direct depuis la Maison de l’UNESCO à Paris quelques-unes des interventions orales pertinentes de l’ Université de la Terre 2015 ayant eu lieu ces deux derniers jours en marge de la COP21. Bien évidemment, ce choix est subjectif et en rapport aux choix des conférences suivies.

« Il faut changer notre état d’esprit! Entrer dans la désobéissance créative en disant non à ce qui est violent; non à une alimentation toxique ; non à la haute finance qui nous détruit et nous manipule. Et dire oui à la paix; oui à un monde équitable. La désobéissance créative est dans la tête ET dans le cœur!  »

Vandana Shiva (co-fondatrice du mouvement altermondialiste) à la conférence « Pour une désobéissance créatrice ».

« Ne laissez pas les autres vous dire ce qui appartient au progrès et ce qui n’appartient pas au progrès. Ne laissez pas les autres vous dire ce qui fait sens, ne laissez rien ni personne penser à votre place, vous êtes le seul juge! Ne cédez pas aux analyses raccourcies comme « on ne peut pas faire autrement », « la croissance c’est la survie », etc. N’acceptez pas les pensées prémâchées, entrez dans une résistance de pensée. Ce qui se joue maintenant, c’est l’avenir de l’humanité. Ce n’est plus des mots dont nous avons besoin. Just do it! »

Nicolas Hulot (président de la Fondation pour la Nature et l’Homme) à la conférence « Pour une désobéissance créatrice ».

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L’affiche Université de la Terre 2015 à Paris

« Vous me demandez: que peut-on apprendre de l’autre? Moi, j’apprends de vous et découvre une de vos coutumes. Je découvre que vous prenez plus soin de vos chiens que de vos frères. Vous couvrez vos chiens, leur donnez de la nourriture coûteuse et spécifique, mais vous laissez mourir vos frères dans vos rues devant vous. Nous, on ne laisserait jamais quelqu’un mourir de faim. Je respecte votre coutume mais… c’est une drôle de coutume. »

Mundiya Kepanga (leader papou traditionnel) à la conférence « Comment apprendre de l’Autre ? »

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Conférence « Vers une économie positive: comment accélérer la transition? ». De gauche à droite: Tristan Lecomte, Arnaud Deschamps, Nathalie Croisé (modératrice), Corinne Lepage et François Marty.

«Chacun remarque une porosité de plus en plus forte entre le monde de la finance, de l’économie, des Etats, des ONG et des citoyens. C’est ici que se trouve l’accélérateur de la transition écologique de notre société vers une durabilité forte. Ne pas chercher ce qui nous sépare des autres sphères, mais au contraire construire des ponts et des complémentarités. Certes, on peut être suspicieux et critique, faire du greenbashing, cela fait plaisirs, on se sent meilleur que les autres parce qu’on peut critiquer une grosse entreprise internationale, mais soi-même que fait-on ? Tout autant, il ne faut pas être béni oui-oui, les lanceurs d’alertes sont importants pour dénoncer, comme le fait Greenpeace, afin de pousser vers l’avant le combat. Beaucoup de personnes se lancent dans des projets vecteurs de solutions et de croissance créateurs d’emploi. Donc c’est bon pour tout le monde, pour nous les humains et pour la planète. Les manifestations autour du COP21 sont d’excellentes opportunités pour faire travailler ensemble le public, le privé et les citoyens ensemble. »

Tristan Lecomte (fondateur d’Alter Eco et de Pur Projet) à la Conférence « Vers une économie positive : comment accélérer la transition ? »

« Des entreprises font des choses remarquables, mais nous nous sommes rendu compte qu’en réalité, bien souvent, elles avaient réinventé la roue en partant de rien. Elles démarraient des solutions qui en plus n’étaient pas toujours aussi bonnes que celles qu’on avait déjà trouvées ailleurs. En résumé, certaines entreprises se trouvent dans des situations que d’autres se trouvaient auparavant, mais ne le savent pas. D’où l’idée de créer le mouvement des entreprises de la nouvelle économie (MENE) »

Corinne Lepage (présidente du Rassemblement Citoyen-Cap21) à la Conférence « Vers une économie positive : comment accélérer la transition ? »

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Conférence « Le climat, à quel prix? ». De gauche à droite: Romain Ferrari, Myriam Maestroni, Jean-Louis Caffier (modérateur), Christine Bargain, Stéphane Dedeyan, Bertrand Swiderski et Christian de Perthuis

« Aujourd’hui, on tarifie le carbone qui est sous nos pieds. À chaque fois que nous transformons un stock d’énergie fossile en énergie, on y donne un prix à ce carbone. Ce prix est celui du pétrole, du charbon, du gaz, etc. Les marchés internationaux fonctionnent à partir de ces prix et les acteurs prennent des décisions par rapport à ces prix. Le carbone qui s’accumule au-dessus de nos têtes dans l’atmosphère, et dont le stock contribue au dérèglement climatique, notre économie ne le tarifie pas ou très peu! Donc depuis le début de la révolution industrielle, nous avons construit un système économique qui repose sur la gratuité de l’usage de cette atmosphère. Pire, si je regarde aujourd’hui dans le monde, pas loin de 500 milliards de dollars par an d’argent public continue à être dépensé par un certain nombre de gouvernements pour subventionner l’usage des énergies fossiles ! Et pas qu’en Indonésie et à l’autre bout du monde, mais en Allemagne, en Irlande et dans une moindre mesure en France! Cela veut dire que dans le cadre des valeurs qui s’échangent dans le monde aujourd’hui, en réalité, nos règles économiques donnent une valeur négative à la protection du climat, puisque notre système économique incite plus à développer et utiliser des énergies fossiles qu’à les réduire ou qu’à basculer le plus vite possible vers des énergies renouvelables. A mes yeux, l’enjeu majeur de la COP21 est de basculer de ce système économique dans lequel nous donnons une valeur zéro à la protection du climat – en ne mettant pas un coût associé à l’usage des énergies fossiles et donc en ne mettant pas dans l’économie un coût aux dommages climatiques à chacune de nos émissions – vers une économie où demain le prix du carbone doit devenir la balise principale qui indique à un nombre croissant d’acteurs économiques quel est ce coût du dommage climatique associé à ces émissions de gaz à effet de serre. Lorsque nous aurons passé d’une économie où l’on tarifie aujourd’hui uniquement le carbone d’en bas (qui est sous nos pieds) vers une économie où le prix du carbone d’en haut (celui qui dérègle le changement climatique) possédera une valeur qui deviendra déterminante, alors vous verrez que l’ensemble des choix économiques qui sont faits de par le monde seront complètement différents et permettront de sortir de cette économie où, je le rappelle, 80% de nos ressources d’énergie dans le monde proviennent des énergies fossiles. »

Christian de Perthuis (professeur d’économie à l’Université Paris Dauphine, fondateur de la Chaire Économie du Climat) à la conférence « Le climat, à quel prix ? »

« Aujourd’hui, le prix du carbone est un enjeu de distribution en rapport aux conditions sociales de la tarification. Quelles sont les entreprises qui vont accepter de payer, jusqu’où vont-elles payer ? Quel est l’enjeu de la COP21 sous cet angle là ? Très simple. On émet aujourd’hui à peu près 50 milliards de tonnes d’équivalent CO2 dans le monde. Je mets un prix du carbone de 20 dollars la tonne de CO2 et je fais l’hypothèse que l’intégralité des ces 50 milliards sont soumis à la tarification du carbone. Je crée 1000 milliards de dollars. Question posée à la COP, comment est-ce que je répartis ces 1000 milliards de dollars entre les pays riches et pauvres, entre les pays émergents qui sont aujourd’hui au cœur de la négociation ? Car aujourd’hui, nous savons bien que l’issue de la COP21 dépend très largement de ce que fera la Chine et les pays pétroliers, charbonniers, gaziers qui ont fondé leur prospérité sur ces énergies fossiles. Vous voyez bien que dans la tarification du carbone, si on met en place une véritable tarification du carbone on va en réalité créer une nouvelle valeur qui va modifier la répartition des revenus entre les différents acteurs économiques et cela n’est plus un problème écologique, mais une question d’économie politique et de justice. Qui va bénéficier ? Qui va être compensé ? Qui ne va pas l’être ? Certains pensent que l’Inde ne veut pas entrer dans un règlement climatique avec un prix du carbone. Mais si demain, vous dites à l’Inde que sur les 1000 milliards de dollars je vous les répartis à égalité per capita, demain l’Inde signe ! Cela lui ferait un transfert de revenus énorme, mais qui ne voudra pas signer ? Nous, les pays riches. Derrière la question du prix du carbone se cache donc la question de l’équité, des pays pauvres, riches et émergents. »

Christian de Perthuis (professeur d’économie à l’Université Paris Dauphine, fondateur de la Chaire Économie du Climat) à la conférence « Le climat, à quel prix ? »

« L’économie circulaire, c’est un bon exemple pour la France. Quand on dit que la France émet 500 millions de tonnes par an, on en oublie à peu près la moitié. En effet, on oublie ce qu’on appelle les émissions de consommation. C’est l’émission que les autres ont émis pour notre compte pour fabriquer les matières premières – qui sont finalement les étapes de fabrication les plus importantes – voir les articles que nous importons. Donc l’empreinte totale de la France est plutôt autour de 750 millions de tonnes. »

Romain Ferrari (président de Fondation 2019) à la conférence « Le climat, à quel prix ? ».

« On est encore aujourd’hui sur du marginal. C’est assez inquiétant parce que l’externalité totale climat de l’activité économique est de 1000 milliards de dollars, alors qu’aujourd’hui la COP21 veut créer un fond de 100 milliards… Mais comment va-t-on faire pour boucher le reste ? Alors on nous dit : « oui avec un prix du carbone soumis à une espèce de taxe, on va y arriver ». Mais du coup, il y aura des applications différenciées et donc des mouvements de délocalisation ou de relocalisation d’activité au petit bonheur la chance… Attention, on va devoir mettre en œuvre des instruments économiques qui sont extrêmement puissants. Or si déjà vous avez peur de lever 100 milliards, comment vous allez faire pour lever 1000 milliards ? Aujourd’hui, on ne fait pas beaucoup de psychologie des instruments économiques. Exemple. Prenez un baril de pétrole qui contient toujours 159 litres. Quand on l’extrait, on est à peu près certains qu’il va émettre 400 kg de CO2 qui servent à chauffer un bâtiment, à faire rouler une voiture, à fabriquer des matières plastiques. 400 kg de CO2 multiplié par disons une valeur sociale du carbone à 25 dollars la tonne (c’est pratique), cela fait… 0.4×25…  10 dollars pour un baril qui en vaut aujourd’hui entre 42 et 45 dollars. L’externalité carbone du baril de pétrole est de 10 dollars. On commence déjà là à appréhender une somme. 10 dollars, ce n’est pas si gros que ça. Nous, les industriels dans cette salle, si demain le baril passe de 42 à 52 dollars qui est mort ? (ndlr : personne ne lève la main dans la salle). Pendant qu’on y est on peut appliquer cela au charbon (comptez un coût supplémentaire de 13 dollars) et au gaz (comptez un coût supplémentaire de 7 dollars). Imaginez maintenant que l’on met en place un droit d’accise [ndlr : un impôt indirect perçu sur la consommation de certains produits]. C’est-à-dire qu’on demande aux extracteurs de ces ressources lorsqu’ils extraient un baril de pétrole de le mettre sur le marché non pas à 42 dollars, mais à 52 dollars et de redonner 10 dollars à un organisme international. On lèverait 300 milliards pour le pétrole et 1000 milliards pour l’ensemble pétrole-charbon-gaz. Tiens, c’est drôle, on tombe exactement sur le même chiffre que l’externalité totale climat. Ceci sans perturber l’économie. On est ici avec un instrument économique qui va pouvoir se nourrir de vrai cash. Après qu’est-ce qu’on en fait ? Avec 1000 milliards, on peut penser à des instruments économiques qui ont la puissance : sanctuarisation pour le Parc national de Yasuni en Équateur, politiques d’adaptation pour les pays du Sud, etc., mais aussi financer la transition facteurs 2 ou 4 dans les pays développés car elle reste à faire ! »

Romain Ferrari (président de Fondation 2019) à la conférence « Le climat, à quel prix ? ».

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Jacques Attali a démarré l’Université de la Terre 2015 avec une conférence intitulée « Peut-on prévoir l’avenir? » dans une salle comble.

Rédaction et photos par Nour El Mesbahi (NiceFuture)

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Mise à jour le 7 décembre 2015 à 9 h 33 min

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