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NiceLab 3 en Amazonie : un effet papillon

Au début de l’automne dernier, l’association NiceFuture m’a invité à participer au premier NiceLab à Mergoscia au Tessin. L’idée était de se retirer pendant trois jours dans un petit village entouré d’une forêt de châtaigniers afin d’élaborer ensemble la vision d’un monde durable, d’imaginer conjointement une relation intégrante avec la nature et une manière différente de vivre ensemble, un futur respectueux de notre planète, des autres et de nous-mêmes. Parmi les invités, il y avait l’imposante carrure de M. Almir Narayamoga, grand chef du peuple Surui d’Amazonie. A l’issue du séjour, Almir nous a invités à poursuivre l’expérience chez lui, avec des représentants de son peuple vivant en pleine forêt.

Un petit groupe enthousiaste d’une douzaine de personnes est donc parti ce printemps pour ce qui s’avérera un lointain voyage, et pas seulement en termes de déplacements longitudinaux et latitudinaux sur la surface de notre planète ! Sous les dernières pluies de la saison humide, dans cette immensité verte du far-west brésilien, nous nous sommes rendus à Lapetanha, un des villages du peuple Surui, au cœur de la forêt dans laquelle ils vivent, dénommée Terre indigène du Sept Septembre. Nouveaux bruits, nouveaux silences, nouvelles odeurs, nouvelles sensations d’humidité sur la peau, et partout de nouvelles formes de vie: insectes, plantes, oiseaux.

Jour après jour se faisait l’adaptation au rythme de vie d’un peuple confronté depuis à peine 50 ans à tout ce qui fait ici notre vie moderne : la technique, l‘information mondialisée, l’argent, etc. En filigrane, émergeait l’apparition profondément émouvante de fondamentaux de l’humanité telle que l’attention à l’autre, le respect, la joie intérieure et l’humour. Des rencontres d’une intensité humaine très forte se sont succédé. Le peuple Surui possède une conscience locale incarnée de responsabilité globale et une compréhension extrêmement réaliste de l’état du monde et de l’environnement. Il porte en lui une dignité immense qui rayonne, impressionne et impose un profond respect.

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Papillon « Kaler Mebaab » de la forêt amazonienne

Je découvrais peu à peu que cette humanité est enracinée et connectée avec la forêt, qu’elle n’est en quelque sorte qu’une composante de ce qu’on pourrait appeler une « naturalité » beaucoup plus vaste. Force est de constater que notre société occidentale a laissé une grande partie de tout cela au bord de la route en avançant dans le développement. Au fil du séjour, la force et la diversité des liens entre le peuple surui et leur forêt devient de plus en plus perceptible. Des évènements viennent bouleverser ma manière d’expliquer certains phénomènes du monde. Par exemple, l’apparition de nouvelles chaînes de causalités ou de simultanéités entre des chants, des récits, la présence d’insectes, des vols d’oiseaux et l’arrivée de courants d’air.

Dernier jour. Cinq heures du matin. À partir de l’est, de grandioses lumières orange et rouges commencent à perforer les immenses nuages sombres du ciel. Dans le hall en béton d’un aéroport minimaliste sorti d’on ne sait où, tournoyant en grands cercles incertains sous la lumière glauque des néons, un immense papillon bleu lumineux était venu nous dire au revoir. Tout simplement un des nombreux esprits vivants de la forêt amazonienne qui se manifestait et contribuait à sa manière par des circonvolutions dans l’espace de ce hall à l’écriture de notre récit du futur.

Dans l’avion du retour, un sentiment peu à peu devient évidence: on ne perçoit qu’une partie infime de ce qu’est la vie. La forêt est bien plus proche de nous que ce que nous pourrions imaginer. Bien qu’ayant consacré jusqu’à présent une partie de ma vie à la forêt, j’ai le sentiment d’être passé à côté de beaucoup de choses qui sont pourtant très réelles et essentielles – un immense champ de connaissance à découvrir encore pour notre civilisation. Se reconnecter à soi-même et à la nature : une phrase que j’entends de plus en plus souvent. En Suisse, la forêt offre cette possibilité à chacun de nous.

Ayant fait connaissance avec l’association NiceFuture lors de l’événement G21 Swisstainability Forum de 2015, je suis impressionné par son action. NiceFuture va hors des sentiers battus. Elle est active sur cette interface peu explorée – et surtout peu mise en lumière – entre des innovations environnementales high-tech qu’elle met en lumière et la partie émotionnelle d’intériorité, indispensable à l’épanouissement personnel et à l’évolution des consciences pour une transition écologique. Au-delà de son originalité, l’idée des NiceLabs initiée par NiceFuture est prometteuse car elle répond au besoin de compréhension, mais également à la partie sensible se trouvant en chacun de nous. Grâce à cet ancrage solide dans les deux réalités du monde (intérieure et extérieure), et personnelles (rationnelle et émotionnelle), ces labs permettent de jeter des ponts et de tisser des liens entre les différents champs de la vie.

Jean Rosset, Conservateur des forêts au sein de la Direction générale de l’environnement du Canton de Vaud et protagoniste du NiceLab 3 en Amazonie.

Présentation du NiceLabs 3 en cliquant ici
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résentation du projet NiceForest en cliquant ici

Retrouvez les témoignages des protagonistes de ce magnifique voyage, ainsi que les plus belles photos dans le NiceFuture Magazine CH2040 (sortie prévue le 28 juin 2016 dans les librairies et sur notre BoutikEtik).

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Mise à jour le 7 juin 2016 à 12 h 14 min

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